His Laments, posté par Aranna le 13-03-2008 à 11:51

Arcane XVI - Old Memories



Fermant les yeux, il sentit d?anciens souvenirs affleurer la surface de son esprit. Des souvenirs presque aussi vieux que lui, et pourtant toujours vivants, encore palpitants, comme un c?ur à peine arraché.
Il revit comme si c?était hier le paysage brumeux, indistinct. La nuit noire tendue sur la fête, parsemée de milliers d?étoiles, les vent dans les arbres, le feu de Beltaine brûler haut et claire au centre du minuscule village. Il entendait encore les voix des femmes et les voix des hommes chanter, il pouvait les voir sauter par-dessus le feu. Il entendait les tambours gronder, les cris de joie.
C?avait été une époque heureuse, pour sûr. Mercy et Fortuna, qui n?étaient pas encore jumelles, et que l?on n?appelait pas encore comme ça, avaient trouvé le moyen de s?incarner à peu près au même moment au même endroit. Fortuna était un peu plus vieille que Mercy, et dans cette vie là, ni l?une ni l?autre n?avait conscience que leurs existences étaient liées. Elles étaient simplement deux amies, deux voisines qui avaient battu la lande et travaillé ensemble depuis leur plus jeune âge. Elles en étaient pour l?heure parfaitement heureuse. Il avait appris beaucoup plus tard la véritable identité de ces deux fillettes, et pour tout dire, cela lui avait fait un sacré choc. Il ne s?en souvenait donc que comme deux enfants parfaitement ordinaires.
Lui-même n?était qu?un jeune homme, ignorant encore tout ce qui allait suivre. Qu?il ne mourrait pas comme les hommes ordinaires, puisqu?il n?en était pas un. A moins qu?il n?en ai été un, mais un homme qu?une rencontre en apparence anodine allait ravir à jamais au monde et à l?insouciance.
Contrairement aux autres, il avait gardé son nom. Eadha. Voilà qui sonnait étrangement pour l?époque actuelle, et personne ne le prononçait jamais correctement, mais il était la dernière preuve aussi ténue fusse t'elle, qu?il avait été un jour, mortel, vivant, vulnérable et humain.

Ecrit sur : Toss the Feathers - Cherish the Ladies

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Sword, Stone, Steel, posté par Aranna le 02-03-2008 à 18:35

Arcane XXVI - Au commencement étaient le Sabre et la Pierre

Aux premiers temps du monde, quand tout n?était encore que chant et sommeil, l?histoire raconte que Stone et Sword étaient là, premiers-nés, destinés à régir la vie des hommes, la façonnant entre leurs mains.

Sword, l?aîné, leurs insufflait le premier souffle, le sens de l?existence, la créant du bout des doigts, engendrant les possibles. Il était le Premier, le Conquérant, l?Epée.

Stone, le cadet, modelait entre ses paumes la glaise de leurs êtres, le chant de leurs âmes. Les libérant ou les liant à sa guise. Stone était la Pierre, l?Immuable, la Stase. Et de son règne dépendait le chemin des hommes, et ce que ces derniers nommaient tour à tour hasard, coïncidence ou volonté des Dieux.

Il aurait pu en aller ainsi l?éternité durant, mais les choses étant ce qu?elles sont, même dans les terres des Immortels rien ne durent éternellement. La vie des hommes s?effilochait impitoyablement, mais rien ne venait y mettre un terme, et en vérité, c?était pitié de voir leurs corps se traîner inlassablement sans repos ni espérance. Il aurait fallût quelqu?un pour y remédier.

« Ce ne sont pas nos affaires, dirent les Dieux. Nous avons créé pour cela Stone et Sword. Le reste ne nous regarde pas. »

« Telle tâche n?est pas de mon ressort dit Sword. Je suis celui qui créé, le Donneur de vie, le Fileur. Et par voie de fait, je refuse de mettre fin à mes ?uvres. »

« Je ne suis pas l?homme de la situation dit Stone, imperturbable. Je suis les coups du sort, le jet de dés, les n?uds du destin, le Tissage subtil. Mettre fin aux possibles n?est pas en mon pouvoir. »

Il fallait cependant trouver quelqu?un. Mais personne, dieux, mortels ou immortels, ne voulait se charger d?une telle tâche.
Il fût créé un enfant, un enfant plus pur que la nuit, et plus terrible que l?orage, un enfant dont le premier nom dort dans le souvenir du monde, et cet enfant la devait être plus seul que ne le serait jamais aucune autre création. Un enfant destiné à abréger le destin des hommes. Un être inexorable qui ne cèderait jamais, que ce soit devant plus suave des femmes, la plus éplorée des mères, la plus pieuse des jeunes filles. Un être qui ne reculerait devant rien, et qui ne connaîtrait jamais le doux sommeil de la fin, et la paix de l?oubli.

Ainsi naquit Steel, et seul certains savent, comme les Jumelles, comme le Vieux, que dans les premiers temps du monde, Steel était une femme. Et pour cela, Stone et Sword la méprisèrent toujours.


Ecrit sur : The Well - Omnia

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Thorn, posté par Aranna le 17-01-2008 à 21:42

Arcane XXVI (?) - L'histoire de Thorn. (Part I )


Je suis restée longtemps immobile, les yeux fixés sur l?horizon, comme si l?intensité de mon regard avait eu le pouvoir de changer la situation, comme si il y avait eu quelque chose à attendre, à espérer dans la vision de cette ligne écrasée par le ciel gris, dans le dessin pâle et hésitant des collines blêmes et dans les arbres décharnés.

La vérité, c?est qu?il n?y avait rien à attendre, rien à espérer. Contrairement à ce qu?il aimait prétendre, demain ne changerait rien à l?affaire. Il n?y avait aucun futur sous mes pas, aucun avenir à dérouler. J?aurai pu tout aussi bien pu ne pas exister, n?être qu?un reflet, une imitation. J?aurai pu ne pas avoir de vie propre, nulle consistance, aucun souhait, rien d?autre que le minuscule espace que mon corps remplissait autour de moi, donnant à voir ce que tous les imbéciles nomment réalité, mais qui n?est en fait qu?une projection incomplète de ce que nous cachons à l?intérieur de nous. Mais personne ne veut voir l?intérieur. Il est beaucoup plus confortable de se cantonner à cette coque de chair que nous montrons.

Je me souviendrais jusqu?à la fin de mes jours ce moment où il me l'a dit. Je me souviens de la couleur de la lumière, de l?amertume que le thé a pris sur ma langue, de la sensation de voir les couleurs, les formes devenir aiguës, acides. Je me souviens de mon propre noeud, de cet ouroboros au fond de moi qui me dévorait de l?intérieur, qui me lacérait les entrailles, saccageant chaque parcelle de vie.

Le plus drôle, c?est que, pour une fois, il avait été limpide. Il m?a dit qu?il ne parlait jamais du futur, qu?il était comme ca, et que je ne devais rien attendre. Evoquer simplement des possibles était à la limite de l?impossible.
Je pouvais tout aussi bien rester là, comme un animal domestique ou un enfant incapable de faire autrement. Mais comme beaucoup d?êtres humains, j?ai besoin de signes, j?ai besoin de marques. J?ai besoin d?une lampe sur mon chemin. J?ai besoin de savoir si l?autre me suit par habitude, par lassitude ou par désir. J?ai besoin de savoir si je suis là par envie, par volonté ou si, les années aidant, je ne suis plus qu?une ombre accrochée à des pas.

Il n?y avait pas de réponses à mes questions. Il n?y avait pas de futur à montrer, pas d?avenir vers lequel tendre. Seulement cette étendue glacée et la nécessité d?attendre, silencieuse, immobile.

Je n?ai pas pu. Alors un matin, sans prévenir, sans même avoir laissé entendre que je pourrais le faire, je suis partie.


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Sounding silence, posté par Aranna le 16-01-2008 à 13:12

Arcane XXVI (?) - The sound of Silence

Laisse les tomber tes mots, tout au fond de toi. Laisse les t'envahir, un par un, doucement, comme la pluie dehors.
Collé à la fenêtre, regarde-les se fissurer, les murailles de la Ville, les murailles de ton coeur. Il est trop tard pour invoquer un semblant d'humanité. Tu sais ce que tu as à faire, fait le jusqu'au bout. Elle se brisera, probablement. Mais qu'y peux tu ?
Laisse là aller, laisse là mener ses combats, là où elle marche, tu ne peux pas la suivre. Personne ne saura rien de ton courage comme de ta lâcheté, personne ne saura que tu a répugné à le faire. Parce que cela ne changera rien.

Fais silence maintenant, observe le, goûte le. Il est le son de la neige qui tombe, le son de l'acier que l'on forge.

Tu peux refuser. Mais par un hasard tour à tour cruel et bienheureux, tu sais que tu n'auras pas besoin de mener ce combat contre toi-même. La bobine est presque déroulée.
Ils complotent dans ton dos.
Il aiguise sa lame.

Ils ne savent pas que tu le sais déjà, et que tu écartes volontairement tous les autres possibles.

Esquisser un sourire, un faux semblant de sourire pour être vraiment juste. Personne ne viendra te dis-tu avec un reflux d'amertume. Le fou est déjà mort ou pas encore né. Quelle différence ?

Quelque part dans la nuit, un claquement sec se fit entendre.

Ecrit sur : The sound of silence - Simon & Garfunkel

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Echiquier, posté par Aranna le 11-01-2008 à 19:38

Arcane XXVI - L'échiquier


« A l?heure qu?il est, toutes les pièces sont en place, gentiment alignées sur l?échiquier, prêtes pour la partie. Le Vieux a sa reine, Steel son fou; disposés à les sacrifier si nécessaire. Le plus tordant étant sans doute que les pièces ignorent qu?elles ne sont rien de plus que de vulgaires jouets dans la main de ces messieurs, comme si il avait pu en être autrement.
La partie, leur partie va commencer, ils vont se défier, s?évaluer du coin de l??il, se renifler, comme deux mâles dominants. Le Vieux ouvrira le bal, avancera ses pièces, les une après les autres. Steel fera exactement pareil. Puis d?un seul coup viendra la mise à mort, sans prévenir, sans pitié, inexorable, comme toujours. Sauf que cette fois, c?est nous qui porterons le coup de grâce. »

Sword éclata d?un rire rauque et gras et se tourna vers Stone, assis à côté de lui. Stone ne répondit pas tout de suite, se contentant de se gratter le sommet du crâne, l?air pensif.

« Je ne sais pas trop. Sans doute, sans doute. Mais si le Bibliothécaire a ramassé cette fille, c?est qu?il y a une raison. Et puis, -il hésita un moment-, je me méfie d?Ajnar. »

Un rictus de mépris passa sur le visage de Sword.

« Le Vieux a ramassé à la petite cuillère une donzelle qui s?est écroulée à ses pieds, la belle affaire. Il a joué son va-tout, et il a perdu sa mise. Cette Thorn est une coque vide pétrie d?admiration pour un vieux cinglé qui l?a déjà oubliée, sauf pour la mener à la mort. La belle affaire, oui vraiment éructa t?il. » Prenant à peine le temps de reprendre son souffle, il poursuivit :

« Quand à l?autre là, cette espèce de vermine, cette petite garce qui suit Steel comme une chienne en chaleur, il est temps de s?en débarrasser. Oui je sais, dit-il en voyant l?ombre d?une protestation sur le visage de Stone, je sais, le Vieux voudrait que la lignée continue. La lignée est morte le jour où Entiokar est morte. Sa fille est une imitation de Chasseur, un déchet humain, juste au dessus de la décharge publique. Mais mademoiselle a pliée la maison, alors, forcément. Et puis mademoiselle terrorise tout le monde avec ses crises et mademoiselle ne s?adresse qu?à Steel alors à peu près tout le monde s?ingénie à lui trouver des excuses. C?est hors de question.
Je ne lui ai jamais pardonné de s?être conduit comme elle l?a fait, comme si une loque humaine pouvait nous plier nous à sa propre volonté. Non ajouta t?il avec un sourire mauvais. J?espère que notre frère aura l?intelligence de nous écouter et de faire ce qu?on lui dit, pour une fois. Mais, si tu veux mon avis, il n?en fera qu?à sa tête, comme il a toujours fait. Lui et le Vieux ont toujours été comme larron en foire. Peuh. » Et sur ces mots, il cracha par terre.

Ecrit sur : Le chant des bannis - Your Shapeless Beauty

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